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TRAVERSEE MALDIVES (uligan) YEMEN (Aden)

 

 

                         Ce matin un vent de 12nds nous fait naviguer sur une mer à peine ondulée par l’ample houle du large. Le ciel est piqué de quelques petites houppettes blanches et augure d’une belle journée. C’est ainsi que mon capitaine me parlant de cette traversée (la dernière relative à un océan) m’avait fait rêver. Pas ou peu de mer, peu de vent soufflant dans la direction la plus agréable pour CERS et son équipage, un grand soleil le jour, et une lune bienveillante la nuit dans un ciel étoilé. Pas de grains. Le rêve étant devenu réalité, nous devions connaître la félicité des navigateurs comblés.

                          Mais le grand maître en avait décidé autrement !!! Partis des Maldives le vendredi 1er février nous passons 8 jours éprouvants après seulement 24h au moteur pour cause d’absence de vent ! Lorsqu’il se lève, il est de NO à peu près notre cap pour rejoindre Aden !!! La mer devient vite hachée, agressive, rendant toute vie pénible. Le bateau gîte bâbord et ses soubresauts imprévisibles bouleversent tout ce qui n’est pas calé. …….Les grains se suivent et les surventes sont nombreuses nous obligeant à réduire suffisamment et assez tôt sous peine de risquer un accident physique ce que nous appréhendons le plus.

                            Cinq bateaux ont quitté les Maldives pour la même destination mais nous sommes 3 à maintenir la cohésion : Virus en mer  Llevame et Cers. Le 8 février nous apprenons avec stupéfaction que Llevame vient de démâter !!! André et Betsy ont dû tout laisser aller dans les profondeurs : le mat et son gréement, le génois et la grand voile tous les deux neufs ! Il ne leur reste plus qu’à poursuivre au moteur. Mais leur réserve de gasoil est trop juste et les litres offerts par Virus en mer venus les rejoindre, indispensables pour atteindre Salalah, port au Sultanat d’Oman. Nous ne pouvons pas les laisser seuls au cas

où …………C’est alors notre prochaine destination commune ! Nos amis espèrent y résoudre le plus gros du problème qui vient de leur tomber sur la tête.

                             En ce qui concerne l’aventure sur CERS, la vie est aussi excitante que variée : -un sac pris dans l’hélice par une nuit sans lune contraignant jean- claude à plonger dans le noir pour l’ôter ! -  Un goutte à goutte d’eau salée au bas d’un hublot du côté constamment à la gîte, hublot qui est le plus souvent dans l’eau ! - Un immense filet de pêcheur contourné en dernière minute au petit jour( il nous en aurait coûté fort cher de ne pas le voir) ! - la courroie de l’alternateur de l’arbre d’hélice complètement rapée qui crie à chaque accélération ! - Une angoisse autour du pactor ne fonctionnant plus pour cause de refonte totale du système winlink( que nous ignorions) ! - Enfin notre première voie d’eau découverte lors d’une visite de routine de la cale, l’eau rentrait au rythme des vagues par la mise à l’air libre de notre puits de dérive ! - Et pour finir le bris de la pièce supportant l’alternateur auxiliaire !

 

 

 

                               Au bout de 12 jours de grosse mer et  de vent fort notre CERS est entièrement recouvert de sel jusqu’au milieu du mat. L’intérieur, salé aussi, est humide car les vagues les plus grosses recouvrant le roof, éclaboussaient le carré en atterrissant dans le cockpit. Voyager tout fermé devient vite asphyxiant et l’on rouvre trop tôt.

                               Le démâtage du trimaran de nos amis motive à lui seul notre escale à salalah. Leurs problèmes sont énormes, les soutenir de notre présence amicale notre but . Nous entrons de nuit dans un immense port de commerce qui comme tel n’est pas équipé pour recevoir les voiliers de passage.

 

 

 

 

 

                                La ville est à 12 km du port, nous louons une voiture pour 6 et nous mettons en commun nos programmes de courses. Ici on ne se déplace pas sans un « shore pass » laisser- passer à présenter au garde à l’entrée de la zone portuaire.

                                Arrivés le 12 fevrier nous quittons le sultanat le17. la mer est belle , le ciel est bleu et le soleil brille ! Nous nous préparons à faire de nombreux milles grâce à notre brise personnelle, celle de notre moteur » Nanni- diésel »- qui est une merveille.

                                    Dès le lundi notre reacher/drifter ( voile d’avant très légère) bien fatigué se déchire, il n’est plus réparable, il était bien utile par tout petit temps et nous manquera beaucoup ! Nous mettrons finalement 5 jours et 5 nuits pour faire les 628 milles Salalah/Aden, nous aidant du moteur chaque fois que notre vitesse tombait trop bas, ce fût une traversée calme.

                                     Il est 9 heures le matin lorsque nous arrivons, la température est douce, dommage que la brume des nuits de pleine lune nous voile les sommets qui semblent plonger dans les eaux du golfe d’Aden. Dès l’aube nous avons longé la côte, il faisait nuit lorsque nous avons distingué les premières lumières de vie.

                                      Que j’aime cette sensation d’arriver au port, nous allons découvrir, même superficiellement un nouveau pays, un peuple inconnu.

 

 

6 JOURS au YEMEN

                                  

                                   Nos 35m de chaîne dans 7m d’eau au fond du mouillage du port d’Aden nous ont procuré la sérénité désirée. Ici les autorités ne se déplacent pas. Notre pavillon jaune est hissé sous les barres de flèches, les capitaines sont invités en tenue correcte et munis des documents bien connus de tous à se rendre à terre pour y faire les démarches d’arrivée sur le territoire.

                                   Nous avons l’intention de passer une semaine au Yémen avec le projet qui me fait briller les yeux, d’aller 2 jours à la capitale SANA’A. Il y a aussi les rituelles réparations de ce qui a cassé pendant la traversée précédente. Cette fois-ci, il s’agit de la pièce reliant le gros alternateur à notre moteur principal. Elle nous a alertés en provoquant de bruyantes vibrations. Dépose, fabrication d’une nouvelle pièce chez un chaudronnier et repose vont occuper Jean-claude  plusieurs ½ journées et l’enduire de graisse noire jusqu’aux épaules.

 

 

                                   Deux jours donc sont consacrés à notre excursion. Nos deux trajets se font en bus confortable, 7 heures de route aller et 8 au retour pour traverser la région entre Aden et Sana’a aux paysages désertiques et spectaculaires. Du rocher ocre et gris, de hauts sommets dont les crêtes déchirent un ciel bleu ou blanc selon la présence de brume ou de vent de sable. Aucune végétation à part quelques petites touffes d’herbe sèche. Avec l’altitude apparaissent petit à petit une multitude de champs de qat. Ils sont clos de murets de pierres habilement disposées, il n’y a aucun ciment. Apparaissent également de maigres troupeaux de bovidés, de chèvres ; des chameaux aussi, des mulets, ..chiens et chats près des habitations. La densité de population tant sur les hauts plateaux que sur les pentes est importante et dispersée ; les villages sont très nombreux et leur architecture telle que leur intégration dans le paysage est parfaite. Je croyais les avoir tous vus à l’aller ; ma surprise a été  grande quand sur la route du retour j’en découvris encore plus. Les milliers de petites lumières sous le ciel étoilé transformaient l’austérité des paysages en féerie envoûtante.

 

 

 

 

                                     Dès les faubourgs la capitale nous impressionne. Située à 2400m d’altitude, c’est une des plus anciennes villes du monde arabe et autrefois carrefour des routes caravanières de l’encens et de la myrrhe. Malheureusement , comme tous les villages traversés les premiers quartiers sont défigurés par les amoncellements d’ordures et de sachets plastiques. Dès nos billets de retours pris et notre hôtel retenu, nous allons vers ce qui nous a attirés ici : la vielle ville de Sana’a. Flâner au hasard de ses ruelles sans nom et dans le souk est un enchantement. Son architecture est unique et ses maisons-tours bien vivantes encore de nos jours nous font marcher le visage levé, les yeux émerveillés. C’est un univers de mosquées, caravansérails (auberges pour les caravaniers) et échoppes. On ne compte pas moins de 50 mosquées à Sana’a ; La nouvelle grande mosquée non achevée aujourd’hui, toute blanche et or 6 minarets encadrant plusieurs coupoles drainera certainement un nombre impressionnant de fidèles tant est grande sa magnificence.

 

 

 

 

 

 

 

                                    Nous entrons dans la vielle ville par  l’unique porte restante de nos jours : Bab el Yémen. Tout de suite, nous sommes engloutis par un monde coloré et bruyant, aux odeurs multiples des épices, dattes confites, raisins sec et guirlandes de mangues ou de fleurs de jasmin. C’est un monde surprenant où seule la circulation des voitures ramène à la réalité. Le panorama depuis la rue Zubair est splendide. Les maisons-tours sont de couleur ocre. Leurs fenêtres traditionnelles, les camarillas, sont surmontées de motifs en ½ lune en plâtre et verre(albâtre, autrefois. Les motifs sont variés mais il faut attendre la tombée de la nuit pour en admirer les couleurs que l’éclairage intérieur illumine.

 

 

 

 

                                     Nous retournons plusieurs fois dans ce monde pittoresque et sommes toujours conquis. Le souk, pour qui aime s’attarder et y consacrer des heures, offre à chacun la possibilité de découvrir la vraie culture du pays. Ici ce sont les hommes arborant leur impressionnant « Jambiah » ou sabre court rangé dans un fourreau et coincé sous une riche ceinture. Le manche peut être en bois ou matière noble, incrusté ou ciselé. C’est un objet unique. Il est la marque de richesse et de puissance de son propriétaire. Presque tous les hommes ont  la joue gauche déformée par une énorme chique de qat, la plante « philosophique et circonstancielle » que tous mâchent à longueur de temps. C’est aussi les échoppes, minuscules et odoriférantes des moulins à huile de sésame où un chameau portant œillères, tourne inlassablement des heures durant pour l’actionner et réduire en liquide les petites graines brunes. Plus loin, c’est le café qui détourne notre regard. Originaire d’Ethiopie, il était jusqu’à la moitié du 18ème siècle la plus grosse exportation du Yémen. Aujourd’hui il est largement supplanté par le thé et le qat. Il pousse entre 1000 et 2500m ; pulpe et cosse de coté le grain est appelé moka du nom du port d’embarquement vers l’europe. Le souk est organisé en corporations, nous passons sans transition du quartier des boulangers à celui des invraisemblables bric à brac des droguistes, quincailleries aux inoubliables vendeurs de pashminas devant lesquels en femme superficielle et futile je reste plantée et subjuguée !!! Un dernier regard vers les bijoux de corail et argent. Le corail est ici une matière semi-précieuse. Associé à l’or, c’est un signe de richesse pour la femme qui en porte.

 

 

 

                                      L’heure du départ est là ; nous prenons le bus de retour et traversons à nouveau Sana’a  l’actuelle où la circulation est cauchemardesque ; les voitures klaxonnent tous azimuts, les motos pétaradent, et les gens crient. Avant la nuit et dès la sortie de l’agglomération nous prenons un ultime plaisir à travers le plus grand plateau cultivé du Yémen.

                                      Nous retrouvons Aden pour une dernière journée, une dernière visite, celle des 18 citernes de Tawila : ce sont des collecteurs pour les eaux pluviales devant protéger Aden d’éventuelles inondations. Creusées en déclivité à même la roche, elles sont reliées entre elles par des canaux. Elles furent abandonnées puis redécouvertes par le

 Lt anglais Lambert.

 

 

                                        Notre surprise aura été grande, il faut le noter, devant la quasi-absence de touristes occidentaux au Yémen. La réputation regrettable de ce pays est sans doute à revoir. Le plein de gasoil et les courses de frais faits, le jeudi 28 février, nous larguons notre mouillage et amorçons notre dernier long parcours vers la mer rouge.

 

Monique.      

 

Oman et yémen
© 2009